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Renaud

L'Absolutely Meilleur De Renaud


Hexagone

Ils s'embrassent au mois de janvier,
Car une nouvelle année commence,
Mais depuis des éternités
L'a pas tell'ment changé la France.
Passent les jours et les semaines,
Y'a qu'le décor qui évolue,
La mentalité est la même:
Tous des tocards, tous des faux culs.

Ils sont pas lourds, en février,
À se souvenir de Charonne,
Des matraqueurs assermentés
Qui fignolèrent leur besogne,
La France est un pays de flics,
À tous les coins d'rue y'en a 100,
Pour faire règner l'ordre public
Ils assassinent impunément.

Quand on exécute au mois d'mars,
De l'autr'côté des Pyrénées,
Un arnachiste du Pays basque,
Pour lui apprendre à s'révolter,
Ils crient, ils pleurent et ils s'indignent
De cette immonde mise à mort,
Mais ils oublient qu'la guillotine
Chez nous aussi fonctionne encore.

Etre né sous l'signe de l'hexagone,
C'est pas c'qu'on fait d'mieux en c'moment,
Et le roi des cons, sur son trône,
J'parierai pas qu'il est allemand.

On leur a dit, au mois d'avril,
À la télé, dans les journaux,
De pas se découvrir d'un fil,
Que l'printemps c'était pour bientôt,
Les vieux principes du seizième siècle,
Et les vieilles traditions débiles,
Ils les appliquent tous à la lettre,
Y m'font pitié ces imbéciles.

Ils se souviennent, au mois de mai,
D'un sang qui coula rouge et noir,
D'une révolution manquée
Qui faillit renverser l'Histoire,
J'me souviens surtout d'ces moutons,
Effrayés par la Liberté,
S'en allant voter par millions
Pour l'ordre et la sécurité.

Ils commémorent au mois de juin
Un débarquement d'Normandie,
Ils pensent au brave soldat ricain
Qu'est v'nu se faire tuer loin d'chez lui,
Ils oublient qu'à l'abri des bombes,
Les Francais criaient: "Vive Pétain",
Qu'ils étaient bien planqués à Londres,
Qu'y'avait pas beaucoup d'Jean Moulin.

Etre né sous l'signe de l'hexagone,
C'est pas la gloire, en vérité,
Et le roi des cons, sur son trône,
Me dites pas qu'il est portugais.

Ils font la fête au mois d'juillet,
En souv'nir d'une révolution,
Qui n'a jamais éliminé
La misère et l'exploitation,
Ils s'abreuvent de bals populaires,
D'feux d'artifice et de flonflons,
Ils pensent oublier dans la bière
Qu'ils sont gourvernés comme des pions.

Au mois d'août c'est la liberté,
Après une longue année d'usine,
Ils crient: "Vive les congés payés",
Ils oublient un peu la machine,
En Espagne, en Grèce ou en France,
Ils vont polluer toutes les plages,
Et par leur unique présence,
Abimer tous les paysages.

Lorsqu'en septembre on assassine,
Un peuple et une liberté,
Au coeur de l'Amérique Latine,
Ils sont pas nombreux à gueuler,
Un ambassadeur se ramène,
Bras ouverts il est accueilli,
Le fascisme c'est la gangrène
À Santiago comme à Paris.

Etre né sous l'signe de l'hexagone,
C'est vraiment pas une sinécure,
Et le roi des cons, sur son trône,
Il est francais, ça j'en suis sûr.

Finies les vendanges en octobre,
Le raisin fermente en tonneaux,
Ils sont très fiers de leurs vignobles,
Leurs "Côtes-du-Rhône" et leurs "Bordeaux",
Ils exportent le sang de la terre
Un peu partout à l'étranger,
Leur pinard et leur camenbert
C'est leur seule gloire à ces tarrés.

En Novembre, au salon d'l'auto,
Ils vont admirer par milliers
L'dernier modèle de chez Peugeot,
Qu'ils pourront jamais se payer,
La bagnole, la télé, l'tiercé,
C'est l'opium du peuple de France,
Lui supprimer c'est le tuer,
C'est une drogue à accoutumance.

En décembre c'est l'apothéose,
La grande bouffe et les p'tits cadeaux,
Ils sont toujours aussi moroses,
Mais y'a d'la joie dans les ghettos,
La Terre peut s'arrêter d'tourner,
Ils rat'ront pas leur réveillon;
Moi j'voudrais tous les voir crever,
Étouffés de dinde aux marrons.

Etre né sous l'signe de l'hexagone,
On peut pas dire qu'ca soit bandant
Si l'roi des cons perdait son trône,
Y'aurait 50 millions de prétendants.

Renaud Séchan
Extrait de l'album "Amoureux De Paname"


Laisse Béton

J'étais tranquille, j'étais peinard
Accoudé au flipper
Le type est entré dans le bar
À commandé un jambon beurre
Puis s'il s'est approché de moi
Puis y m'a regardé comme ça

"T'as des bottes, mon pote, elles me bottent.
J'parie qu'c'est des Santiags
Viens faire un tour dans l'terrain vague
J'vais t'apprendre un jeu rigolo
À grands coups de chaines de vélo
J'te fais tes bottes à la baston."
Moi j'y est dis: "Laisse béton."

Y m'a filé une beigne
J'y ai filé une torgnolle
M'a filé une châtaigne
J'lui ai filé mes groles

J'étais tranquille, j'étais pénard
Accoudé au comptoir
Le type est entré dans le bar
À commandé un café noir
Puis s'il m'a tapé sur l'épaule
Et m'a regardé d'un air drôle

"T'as un blouson, mecton, l'est pas bidon.
Moi j'me les gèle sur mon scooter
Avec ça j's'rai un vrai rocker
Viens faire un tour dans la ruelle
J'te montrerai mon Opinel
J'te chourav'rai ton blouson."
Moi j'y est dis: "Laisse béton."

Y m'a filé une beigne
J'y ai filé un marron
M'a filé une châtaigne
J'ai filé mon blouson

J'étais tranquille, j'étais pénard
Je réparais ma mobylette
Le type a surgi sur l'boul'vard
Sur sa grosse moto super chouette
S'est arrêté l'long du trottoir
Et m'a regardé d'un air bête

"T'as l'même blue jean que James Dean, t'arrêtes ta frime.
J'parie qu'c'est un vrai Lévis Strauss
Il est carrément pas craignos
Viens faire un tour derrière l'église
Histoire que je te dévalise
A grands coups de ceinturon."
Moi j'y est dis: "Laisse béton."

Y m'a filé une beigne
J'y ai filé une mandale
M'a filé une châtaigne
J'ai filé mon futal

La morale de c'te pauvre histoire
C'est qu'quand t'es tranquille et peinard
Faut pas trop traîner dans les bars
À moins d'être fringuer en costard
Quand à la fin d'une chanson
Tu t'retrouve à poil sans tes bottes
Faut avoir d'l'imagination
Pour trouver une chute rigolote.

Renaud Séchan
Extrait de l'album "Place De Ma Mob"


Ma Gonzesse

Malgré le blouson clouté,
Sur mes épaules de v'lours.
J'aim'rais bien parfois chanter,
Autre chose que la zone.
Un genre de chanson d'amour
Pour ma p'tite amazone.
Pour celle qui tous les jours
Partage mon cassoulet.

Ma gonzesse, celle que j'suis avec.
Ma princesse, celle que j'suis son mec.
Oh oh oh

Faut dire qu'elle mérite bien,
Qu'j'y consacre une chanson.
Vu que j'suis amoureux d'elle,
Un peu comme dans les films,
Ou y a tous pleins de violons
Quand le héros y meure.
Dans les bras d'une infirmière,
Qu'est très belle et qui pleure.

Et pis elle est balancée ,
Un peu comme un Mayol,
Tu sais bien les statues,
Du jardin des Tuileries.
Qui hiver comme été
Exhibent leur guibolles,
Et se gèlent le cul
Et le reste aussi.

Ma gonzesse, celle que j'suis avec.
Ma princesse, celle que j'suis son mec.
Oh oh oh

Pis faut dire qu'elle a les yeux,
Tell'ment qui sont beaux,
On dirait bien qu'ils sont bleus,
On dirait des calots.
Parfois quand elle me regarde,
J'imagine des tas de choses,
Que je réalise plus tard
Quand on se retrouve tout seul.

Si tu dis qu'elle est moche,
Tu y manques de respect,
Je t'allonge une avoine
Ce sera pas du cinoche.
Mais si tu dis qu'elle est belle,
Comme je suis très jaloux,
Je t'éclate la cervelle
Faut rien dire du tout.

De ma gonzesse, celle que j'suis avec.
Ma princesse, celle que j'suis son mec.
Oh oh oh

J'aimerais bien un c'est jour,
Y collé un marmot,
Ouais un vrai qui chiale et tout
Et qu'a tout le temps les crocs.
Elle aussi elle aimerais ça,
Mais c'est pas possible,
Son mari y veut pas
Y dis qu'on est trop jeune.

Ma gonzesse, celle que j'suis avec.
Ma princesse, celle que j'suis son mec.
Ma gonzesse, celle que j'suis avec.
Ma princesse, celle que j'suis son mec.
Celle que j'suis avec, ma princesse.

Renaud Séchan / Alain Brice
Extrait de l'album "Ma Gonzesse"


Chanson Pour Pierrot

T'es pas né dans la rue
T'es pas né dans l'ruisseau
T'es pas un enfant perdu
Pas un enfant d'salaud,
Vu qu't'es né dans ma tête
Et qu'tu vis dans ma peau
J'ai construit ta planète
Au fond de mon cerveau.

Pierrot, mon gosse, mon frangin, mon poteau,
Mon copain tu m'tiens chaud.
Pierrot.

Depuis l'temps que j'te rêve,
Depuis l'temps que j't'invente,
De pas te voir j'en crève
Et j'te sens dans mon ventre.
Le jour où tu ramène,
J'arrête de boire : promis,
Au moins toute une semaine,
Ce s'ra dur, mais tant pis.

Pierrot, mon gosse, mon frangin, mon poteau,
Mon copain tu m'tiens chaud.
Pierrot.

Qu'tu sois fils de princesse,
Ou qu'tu sois fils de rien,
Tu s'ras fils de tendresse,
Tu s'ras pas pas orphelin.
Mais j'connais pas ta mère:
Je la cherche en vain.
Je connais qu'la misère
D'être tout seul sur le ch'min.

Pierrot, mon gosse, mon frangin, mon poteau,
Mon copain tu m'tiens chaud.
Pierrot.

Dans un coin de ma tête
Y'a déjà ton trousseau :
Un jean, une mobylette
Une paire de Santiago.
T'iras pas à l'école,
J't'apprendrai les gros mots.
On jouera au football,
On ira au bistrot.

Pierrot, mon gosse, mon frangin, mon poteau,
Mon copain tu m'tiens chaud.
Pierrot.

Tu t'lav'ras pas les pognes
Avant d'venir à table.
Et tu m'trait'ras d'ivrogne
Quand j'piquerai ton cartable.
J't'apprendrai des chansons
Tu les trouveras débiles.
T'auras p't'être bien raison
Mais j's'rai vexé quand même.

Pierrot, mon gosse, mon frangin, mon poteau,
Mon copain tu m'tiens chaud.
Pierrot.

Allez viens mon Pierrot,
Tu s'ras l'chef de ma bande.
J'te r'filerai mon couteau,
J't'apprendrai la truande.
Allez viens mon copain,
J't'ai trouvé une maman:
Tous les trois ça s'ra bien
Allez viens, je t'attends.

Pierrot, mon gosse, mon frangin, mon poteau,
Mon copain tu m'tiens chaud.
Pierrot.

Renaud Séchan
Extrait de l'album "Ma Gonzesse"


Marche À L'Ombre

Quand l'baba-cool cradoque
Est sorti d'son bus Volkswagen
Qu'il avait garé comme une loque
Devant mon rade.
J'ai dit à Bob qu'était au flipp:
"Viens voir le mariole qui s'ramène.
Vise la dégaine,
Quelle rigolade!"
Patchouli-Patogas,
Le Guide du Routard dans la poche,
Aré-Krishna à mort,
Ch'veux au henné, oreille percée.
Tu vas voir qu'à tous les coups
Y va nous taper cent balles,
Pour s'barrer à Katmandou
Ou au Népal.

Avant qu'il ait pu dire un mot
J'ai chopé l'mec par le paletot
Et j'ui ai dit: "Toi, tu m'fous les glandes
Pis t'as rien à foutre dans mon monde.
Arrache-toi d'là, t'es pas d'ma bande
Casse-toi, tu pues, et marche à l'ombre!"

Une p'tite bourgeoise bêcheuse
Maquillée comme un carré d'as
À débarqué dans mon gastos
Un peu plus tard.
J'ai dit à Bob qu'était au flipp:
"Reluque la tronche à la pouffiasse.
Vise la culasse,
Et les nibards!"
Collants léopard
Homologués chez S.P.A.,
Monoï et Shalimar,
Futal en skaï comme Travolta.
Qu'est-c'qu'elle vient nous frimer la tête?
Non, mais elle s'croit au Palace!
J'peux pas saquer les starlettes
Ni les blondasses.

Avant qu'elle ait bu son cognac
Je l'ai chopée par le colback
Et j'ui ai dit: "Toi, tu m'fous les glandes
Pis t'as rien à foutre dans mon monde.
Arrache-toi d'là, t'es pas d'ma bande
Casse-toi, tu pues, et marche à l'ombre!"

Un p'tit rocky barjo
Le genre qui s'est gouré d'trottoir
Est v'nu jouer les Marlon Brando
Dans mon saloon.
J'ai dit à Bob qu'avait fait tilt:
"Arrête, j'ai peur, c't'un blouson noir!
J'veux pas d'histoires
Avec ce clown"
Derrière ses pauvres Ray-Ban
J'vois pas ses yeux et ça m'énerve.
Si ça s'trouve y m'regarde,
Faut qu'il arrête, sinon j'le crève!
Non mais, qu'est-c'que c'est qu'ce mec
Qui vient user mon comptoir?
L'a qu'à r'tourner chez les Grecs
Se faire voir!

Avant qu'il ait bu son Viandox
J'l'ai chopé contre l'juke-box
Et j'ui ai dit: "Toi, tu m'fous les glandes
Pis t'as rien à foutre dans mon monde.
Arrache-toi d'là, t'es pas d'ma bande
Casse-toi, tu pues, et marche à l'ombre!"

Pis j'me suis fait un punk
Qu'avait pas oublié d'êtr'moche,
Pis un intellectuel en loden
Genre Nouvel Obs'.
Quand Bob a massacré l'flipper
On n'avait plus une tune en poche,
J'ai réfléchi
Et j'me suis dit:
C'est vrai que j'suis épais
Comme un sandwich-S.N.C.F.
Et que d'main j'peux tomber
Sur un balèze qui m'casse la tête.
Si ce mec-là me fait la peau
Et que j'crève la gueule sur l'comptoir,
Si la Mort me paye l'apéro
D'un air vicelard.

Avant qu'elle m'emmène voir là-haut
Si y'a du monde dans les bistrots,
J'ui dirai: "Toi, tu m'fous les glandes
Pis t'as rien à foutre dans mon monde.
Arrache-toi d'là, t'es pas d'ma bande,
Casse-toi, tu pues, et marche à l'ombre!
Casse-toi, tu pues, et marche à l'ombre!
Casse-toi, tu pues, et marche à l'ombre!"

Renaud Séchan
Extrait de l'album "Marche À L'Ombre"


Les Aventures De Gérard Lambert

Quatorze Avril 77
Dans la banlieue où qu'y fait nuit
La petite route est déserte
Gérard Lambert rentre chez lui
Dans le lointain les mobylettes poussent des cris...
Ça y'est j'ai planté le décor
Créé l'climat de ma chanson
Ça sent la peur, ça pue la mort
J'aime bien c't'ambiance pas vous? ah bon...
Voici l'histoire proprement dite
Voici l'intrigue de ma chanson
Gérard Lambert roule très vite
Le vent s'engouffre dans son blouson
Dans le lointain les bourgeois dorment comme des cons...
Lorsque soudain survient le drame
Juste à la sortie d'un virage
Y'a plus d'essence dans la bécane
Gérard Lambert est fou de rage!

T'aurais pas dû Gérard Lambert
Aller ce soir là à Rungis
T'aurais dû rester chez ta mère
Comme un bon fils

Il met sa mob sur la béquille
S'assied par terre et réfléchit:
Dans cette banlieue de bidonvilles
Y'a pas un pompe ouverte la nuit!
Dans le lointain y'a une sirène qui s'évanouit...
Qu'est ce que j'vais faire bordel de dieu?
J'vais quand même pas rentrer à pied!
Plus y s'angoisse moins ça va mieux
Quand soudain lui vint une idée:
J'vais siphonner un litre ou deux
Dans l'réservoir de cette bagnole
Et pis après j'y crève les pneus
Comme ça gratuitement par plaisir
Faut bien que j'me défoule un peu j'suis énervé...
Une fois son forfait accompli
Gérard Lambert va repartir
La mobylette veut rien savoir
C'est le bon Dieu qui l'a puni!

T'aurais pas dû Gérard Lambert
Aller ce soir là à Rungis
T'aurais dû rester chez ta mère
Comme un bon fils

Alors pendant une demi heure
Dans son moteur il tripatouille
Il est crevé, il est en sueur
Il a du cambouis jusqu'aux coudes
Dans le lointain le jour se lève comme d'habitude ...
À c'moment là un mec arrive
Un p'tit loubard aux cheveux blonds
Et qui lui dit comme dans les livres:
"S'te plaît dessine moi un mouton,
Une femme à poil ou un calibre,
Un cran d'arrêt, une mobylette
Tout c'que tu veux mon pote t'es libre
Mais dessine moi quequ'chose de chouette!"
Dans le lointain y's'passe plus rien du moins il me semble...

Alors d'un coup d'clé à molette
Bien placé entre les deux yeux
Gérard Lambert éclate la tête
Du Petit Prince de mes deux!
Faut pas gonfler Gérard Lambert
Quand y répare sa mobylette
C'est la morale de ma chanson
Moi j'la trouve chouette
Pas vous? ah bon...

Sol - Fa - Si - Ré - Do - Si - La - Si - La - Do - Ré - Sol

Renaud Séchan / Renaud Séchan & Alain Ranval
Extrait de l'album "Marche À L'Ombre"


Dans Mon H.L.M.

Au rez-d'-chaussée, dans mon H.L.M.
Y'a une espèce de barbouze
Qui surveille les entrées,
Qui tire sur tout c'qui bouge,
Surtout si c'est bronzé,
Passe ses nuits dans les caves
Avec son Beretta,
Traque les mômes qui chouravent
Le pinard aux bourgeois.
Y s'recrée l'Indochine
Dans sa p'tite vie d'peigne cul.
Sa femme sort pas d'la cuisine,
Sinon y cogne dessus.
Il est tellement givré
Que même dans la Légion
Z'ont fini par le j'ter,
C'est vous dire s'il est con!

Putain c'qu'il est blême, mon H.L.M.!
Et la môme du huitième, le hasch, elle aime!

Au premier, dans mon H.L.M.,
Y'a l'jeune cadre dynamique,
Costard en alpaga,
C'ui qu'a payé vingt briques
Son deux pièces plus loggia.
Il en a chié vingt ans
Pour en arriver là,
Maintenant il est content
Mais y parle de s'casser.
Toute façon, y peut pas,
Y lui reste à payer
Le lave-vaisselle, la télé,
Et la sciure pour ses chats,
Parc'que naturellement
C'bon contribuable centriste,
Il aime pas les enfants,
C'est vous dire s'il est triste!

Putain c'qu'il est blême, mon H.L.M.!
Et la môme du huitième, le hasch, elle aime!

Au deuxième, dans mon H.L.M.,
Y'a une bande d'allumés
Qui vivent à six ou huit
Dans soixante mètres carrés,
Y'a tout l'temps d'la musique.
Des anciens d'soixante-huit,
Y'en a un qu'est chômeur
Y'en a un qu'est instit',
Y'en a une, c'est ma soeur.
Y vivent comme ça, relax
Y'a des mat'lats par terre,
Les voisins sont furax;
Y font un boucan d'enfer,
Y payent jamais leur loyer,
Quand les huissiers déboulent
Y écrivent à Libé,
C'est vous dire s'ils sont cools!

Putain, c'qu'il est blême, mon H.L.M.!
Et la môme du huitième, le hasch, elle aime!

Au troisième, dans mon H.L.M.;
Y'a l'espèce de connasse,
Celle qui bosse dans la pub',
L'hiver à Avoriaz,
Le mois d'juillet au Club.
Comme toutes les décolorées,
Elle a sa Mini-Cooper,
Elle allume tout l'quartier
Quand elle sort son cocker.
Aux manifs de gonzesses,
Elle est au premier rang,
Mais elle veut pas d'enfants
Parc'que ça fait vieillir,
Ça ramollit les fesses
Et pis ça fout des rides,
Elle l'a lu dans l'Express,
C'est vous dire si elle lit!

Putain c'qu'il est blême, mon H.L.M.!
Et la môme du huitième, le hasch, elle aime!

Au quatrième, dans mon H.L.M.,
Y'a celui qu'les voisins
Appellent "le communiste",
Même qu'ça lui plaît pas bien,
Y dit qu'il est trotskiste!
J'ai jamais bien pigé
La différence profonde,
Y pourrait m'expliquer
Mais ça prendrait des plombes.
Depuis sa pétition,
Y'a trois ans pour l'Chili,
Tout l'immeuble le soupçonne
À chaque nouveau graffiti,
N'empêche que "Mort aux cons"
Dans la cage d'escalier,
C'est moi qui l'ai marqué,
C'est vous dire si j'ai raison!

Putain c'qu'il est blême, mon H.L.M. !
Et la môme du huitième, le hasch, elle aime !

Pi y'a aussi, dans mon H.L.M.,
Un nouveau romantique,
Un ancien combattant,
Un loubard, et un flic
Qui s'balade en survêtement
Y fait chaque jour son jogging
Avec son berger all'mand,
De la cave au parking,
C'est vachement enrichissant.
Quand j'en ai marre d'ces braves gens
J'fais un saut au huitième
Pour construire un moment
Avec ma copine Germaine,
Un monde rempli d'enfants.
Et quand le jour se lève
On s'quitte en y croyant,
C'est vous dire si on rêve!

Putain c'qu'il est blême, mon H.L.M.!
Et la môme du huitième, le hasch, elle aime!...

Renaud Séchan
Extrait de l'album "Marche À L'Ombre"


Banlieue Rouge

Elle crèche cité Lénine
Une banlieue ordinaire
Deux pièces et la cuisine
Canapé frigidaire
Préférerait habiter
Cité Mireille Mathieu
Au moins elle sait qui c'est
Pis c'est vrai qu'ça f'rait mieux
Sur les cartes de visite
Qu'elle utilise jamais
Ça mettrait du ciel bleu
Sur les quittances de gaz
L'en parlera au syndic
Si elle a une occase

Elle habite quelque part
Dans une banlieue rouge
Mais elle vit nulle part
Y'a jamais rien qui bouge
Pour elle la banlieue c'est toujours gris
Comme un mur d'usine comme un graffiti

Elle a cinquante-cinq ans
Quatre gosses qu'ont mis les bouts
Plus d'mari pas d'amant
Et pis quoi des bijoux?
Y'a bien qu'son poisson rouge
Qui lui cause pas de souci
Encore que y'a des nuits
Quand elle l'entend qui bouge
Elle s'lève pour aller l'voir
Des fois qu'y s'rait parti
Après c'est toute une histoire
Pour s'rendormir ouallou!
Elle essaie Guy Des Cars
Mais elle comprend pas tout

Elle habite quelque part
Dans une banlieue rouge
Mais elle vit nulle part
Y'a jamais rien qui bouge
Pour elle la banlieue c'est toujours la zone
Même si au fond d'ses yeux y'a un peu d'sable jaune

Elle travaille tous les jours
L'a un super boulot
Sur l'parking de Carrefour
Elle ramasse les chariots
Le week-end c'est l'enfer
Quand tous ces parigots
Viennent remplir l'coffre arrière
D'leur 504 Peugeot
De quinze tonnes de lessive
De monceaux de bidoche
En cas d'guerre, en cas d'crise
Ou d'victoire de la gauche
Ce spectacle l'écoeure
Alors elle pense à ces gars
Qui sont devenus voleurs
Elle comprend mieux pourquoi

Elle habite quelque part
Dans une banlieue rouge
Mais elle vit nulle part
Y'a jamais rien qui bouge
Y'a qu'le bleu des mobs qui l'emmène en vacances
Ses histoires d'amour elle les vit dans Confidence

Elle a bien ses p'tites joies
À défaut du bonheur
Quand elle nourrit ses chats
Quand elle parle à ses fleurs
Chaque semaine au loto
Elle mise dix ou vingt balles
Elle joue son numéro
D'sécurité sociale
C'est pas dur c'est pas cher
Mais ça rapporte que dalle
Pis elle écoute la radio
Surtout Michel Drucker
Parc'qu'elle le trouve très beau
Et pas du tout vulgaire

Elle habite quelque part
Dans une banlieue rouge
Mais elle vit nulle part
Y'a jamais rien qui bouge
Entre l'chien en plâtre sur la télévision
Et les castagnettes sur le mur du salon

Chez elle c'est du lino
Mais faut mettre les patins
Dehors c't'assez crado
Faut qu'dedans ça soit bien
Ca pue la pisse de chat
Mais ça on y peut rien
Quand t'aime les animaux
Tu t'arrêtes pas à ça
Elle elle dit qu'en tout cas
Elle aime pas les humains
Pourtant l'a mis l'bon dieu
Juste au-dessus d'son paddok
Elle y croit si tu veux
Mais c'est pas réciproque

Elle habite quelque part
Dans une banlieue rouge
Mais elle vit nulle part
Y'a jamais rien qui bouge
Pour elle la banlieue c'est toujours gris
Comme un mur d'école, comme un graffiti

Renaud Séchan
Extrait de l'album "Le Retour De Gérard Lambert"


Manu

Eh Manu rentre chez toi
Y'a des larmes plein ta bière
Le bistrot va fermer
Pi tu gonfles la taulière
J'croyais qu'un mec en cuir
Ca pouvait pas chialer
J'pensais même que souffrir
Ca pouvais pas t'arriver
J'oubliais qu'tes tatouages
Et ta lame de couteau
C'est surtout un blindage
Pour ton coeur d'artichaut

Eh déconne pas Manu
Va pas t'tailler les veines
Une gonzesse de perdue
C'est dix copains qui r'viennent

On était tous maqués
Quand toi t'étais tous seul
Tu disais j'me fais chier
Et j'voudrais sauver ma gueule
T'as croisé cette nana
Qu'était faite pour personne
T'as dit elle pour moi
Ou alors y'a maldonne
T'as été un peu vite
Pour t'tatouer son prénom
A l'endroit où palpite
Ton grand coeur de grand con

Eh déconne pas Manu
C't'à moi qu'tu fais d'la peine
Une gonzesse de perdue
C'est dix copains qui r'viennent

J'vais dire on est des loups
On est fait pour vivre en bande
Mais surtout pas en couple
Ou alors pas longtemps
Nous autres ça fait un bail
Qu'on a largué nos p'tites
Toi t'es toujours en rade
Avec la tienne et tu flippes
Eh Manu vivre libre
C'est souvent vivre seul
Ça fait p't'être mal au bide
Mais c'est bon pour la gueule

Eh déconne pas Manu
Ça sert à rien la haine
Une gonzesse de perdue
C'est dix copains qui r'viennent

Elle est plus amoureuse
Manu faut qu'tu t'arraches
Elle peut pas être heureuse
Dans les bras d'un apache
Quand tu lui dis je t'aime
Si elle te d'mande du feu
Si elle a la migraine
Dès qu'elle est dans ton pieu
Dis lui qu't'es désolé
Qu't'as dû t'gourrer d'trottoir
Quand tu l'as rencontrée
T'as dû t'tromper d'histoire

Eh déconne pas Manu
Va pas t'tailler les veines
Une gonzesse de perdue
C'est dix copains qui r'viennent

Eh déconne pas Manu
Va pas t'tailler les veines
Une gonzesse de perdue
C'est dix copains qui r'viennent

Eh déconne pas Manu
C't'à moi qu'tu fais d'la peine
Une gonzesse de perdue
C'est dix copains qui r'viennent

Eh déconne pas Manu
Aller déconne pas

Renaud Séchan
Extrait de l'album "Le Retour De Gérard Lambert"


Dès Que Le Vent Soufflera

C'est pas l'homme qui prend la mer
C'est la mer qui prend l'homme, Tin tin tin
Moi la mer elle m'a pris
Je m'souviens un Mardi
J'ai troqué mes santiags
Et mon cuir un peu zone
Contre une paire de docksides
Et un vieux ciré jaune
J'ai déserté les crasses
Qui m'disaient: "Sois prudent,
La mer c'est dégueulasse
Les poissons baisent dedans."

Dès que le vent soufflera, je repartira
Dès que les vents tourneront, nous nous en allerons...

C'est pas l'homme qui prend la mer
C'est la mer qui prend l'homme
Moi la mer elle m'a pris
Au dépourvu tans pis
J'ai eu si mal au coeur
Sur la mer en furie
Qu'j'ai vomi mon quatre heures
Et mon minuit aussi
J'me suis cogné partout
J'ai dormi dans des draps mouillés
Ca m'a coûté des sous
C'est d'la plaisance, c'est le pied

Dès que le vent soufflera, je repartira
Dès que les vents tourneront, nous nous en allerons...

Ho ho ho ho ho hissez haut ho ho ho

C'est pas l'homme qui prend la mer
C'est la mer qui prend l'homme
Mais elle prend pas la femme
Qui préfère la campagne
La mienne m'attend au port
Au bout de la jetée
L'horizon est bien mort
Dans ses yeux délavés
Assise sur une bitte
D'amarrage, elle pleure
Son homme qui la quitte
La mer c'est son malheur

Dès que le vent soufflera, je repartira
Dès que les vents tourneront, nous nous en allerons...

C'est pas l'homme qui prend la mer
C'est la mer qui prend l'homme
Moi la mer elle m'a pris
Comme on prend un taxi
Je f'rai le tour du monde
Pour voir à chaque étape
Si tous les gars du monde
Veulent bien m'lâcher la grappe
J'irais aux quatre vents
Foutre un peu le boxon
Jamais les océans
N'oublieront mon prénom

Dès que le vent soufflera, je repartira
Dès que les vents tourneront, nous nous en allerons...

Ho ho ho ho ho hissez haut ho ho ho

C'est pas l'homme qui prend la mer
C'est la mer qui prend l'homme
Moi la mer elle m'a pris
Et mon bateau aussi
Il est fier mon navire
Il est est beau mon bateau
C'est un fameux trois mats
Fin comme un oiseau (Hissez haut)
Tabarly, Pageot
Kersauson ou Riguidel
Naviguent pas sur des cageots
Ni sur des poubelles

Dès que le vent soufflera, je repartira
Dès que les vents tourneront, nous nous en allerons...

C'est pas l'homme qui prend la mer
C'est la mer qui prend l'homme
Moi la mer elle m'a pris
Je m'souviens un Vendredi
Ne pleure plus ma mère
Ton fils est matelot
Ne pleure plus mon père
Je vis au fil de l'eau
Regardez votre enfant
Il est parti marin
Je sais c'est pas marrant
Mais c'était mon destin

Dès que le vent soufflera, je repartira
Dès que les vents tourneront, nous nous en allerons...
Dès que le vent soufflera, je repartira
Dès que les vents tourneront, nous nous en allerons... (de requin)
Dès que le vent soufflera, je repartira
Dès que les vents tourneront, nous nous en allerons...
Dès que le vent soufflera, nous repartira
Dès que les vents tourneront, je me n'en allerons... (de lapin)

Renaud Séchan
Extrait de l'album "Morgane De Toi..."


Morgane De Toi (Amoureuse De Toi)

Y'a un mariolle, il a au moins quatre ans
Y veut t'piquer ta pelle et ton seau
Ta couche culotte avec tes bonbecs dedans
Lolita, défends-toi, fous-y un coup d'râteau dans l'dos

Attend un peu avant de te faire emmerder
Par ces p'tits machos qui pensent qu'à une chose
Jouer au docteur non conventionné
J'y ai joué aussi, je sais de quoi j'cause
J'les connais bien les play-boys des bacs à sable
J'draguais leurs mères avant d'connaître la tienne
Si tu les écoutes y t'feront porter leurs cartables
'Reusement qu'j'suis là, que j'te regarde et que j't'aime

Lola
J'suis qu'un fantôme quand tu vas où j'suis pas
Tu sais ma môme que j'suis morgane de toi

Comme j'en ai marre de m'faire tatouer des machins
Qui m'font comme une bande dessinée sur la peau
J'ai écrit ton nom avec des clous dorés
Un par un, plantés dans le cuir de mon blouson dans l'dos

T'es la seule gonzesse que j'peux tenir dans mes bras
Sans m'démettre une épaule, sans plier sous ton poids
Tu pèses moins lourd qu'un moineau qui mange pas
Déploie jamais tes ailes, Lolita t'envole pas
Avec tes miches de rat qu'on dirait des noisettes
Et ta peau plus sucrée qu'un pain au chocolat
Tu risques de donner faim a un tas de p'tits mecs
Quand t'iras à l'école, si jamais t'y vas

Lola
J'suis qu'un fantôme quand tu vas où j'suis pas
Tu sais ma môme que j'suis morgane de toi

Qu'est-ce qu'tu m'racontes tu veux un p'tit frangin
Tu veux qu'j't'achète un ami Pierrot
Eh les bébés ça s'trouve pas dans les magasins
Puis j'crois pas que ta mère voudra qu'j'lui fasse un p'tit dans l'dos

Ben quoi Lola on est pas bien ensemble
Tu crois pas qu'on est déjà bien assez nombreux
T'entends pas c'bruit, c'est le monde qui tremble
Sous les cris des enfants qui sont malheureux
Allez viens avec moi, j't'embarque dans ma galère
Dans mon arche y'a d'la place pour tous les marmots
Avant qu'ce monde devienne un grand cimetière
Faut profiter un peu du vent qu'on a dans l'dos

Lola
J'suis qu'un fantôme quand tu vas où j'suis pas
Tu sais ma môme que j'suis morgane de toi
J'suis qu'un fantôme quand tu vas où j'suis pas
Tu sais ma môme que j'suis morgane de toi
J'suis qu'un fantôme quand tu vas où j'suis pas
Tu sais ma môme que j'suis morgane de toi

Renaud Séchan / Franck Langolff
Extrait de l'album "Morgane De Toi..."


En Cloque

Elle a mis sur l'mur
Au dessus du berceau
Une photo d'Arthur
Rimbaud
Avec ses cheveux en brosse
Elle trouve qu'il est beau
Dans la chambre du gosse
Bravo
Déjà les p'tits anges
Sur le papier peint
J'trouvais ça étrange
J'dis rien
Elle me font marrer
Ses idées loufoques
Depuis qu'elle est
En cloque

Elle s'réveille la nuit
Veut bouffer des fraises
Elle a des envies
Balaises
Moi, j'suis aux p'tits soins
J'me défonce en huit
Pour qu'elle manque de rien
Ma p'tite
C'est comme si j'pissais
Dans un violoncelle
Comme si j'existais
Plus pour elle
Je m'retrouve planté
Tout seul dans mon froc
Depuis qu'elle est
En cloque

Le soir elle tricote
En buvant d'la verveine
Moi j'démêle ses pelotes
De laine
Elle use les miroirs
À s'regarder dedans
À s'trouver bizarre
Tout le temps
J'lui dit qu'elle est belle
Comme un fruit trop mûr
Elle croit qu'je m'fous d'elle
C'est sûr
Faut bien dire c'qui est
Moi aussi j'débloque
Depuis qu'elle est
En cloque

Faut qu'j'retire mes grolles
Quand j'rentre dans la chambre
Du p'tit rossignol
Qu'elle couve
C'est qu'son p'tit bonhomme
Qu'arrive en Décembre
Elle le protège comme
Une louve
Même le chat pépère
Elle en dit du mal
Sous prétexte qu'il perd
Ses poils
Elle veut plus l'voir traîner
Autour du paddock
Depuis qu'elle est
En cloque

Quand j'promène mes mains
D'l'autre côté d'son dos
J'sens comme des coups de poings
Ça bouge
J'lui dis: "T'es un jardin,
Une fleur, un ruisseau."
Alors elle devient
Toute rouge
Parfois c'qu'y m'désole
C'qu'y fait du chagrin
Quand j'regarde son ventre
Et l'mien
C'est qu'même si j'devenais
Pédé comme un phoque
Moi j'serai jamais
En cloque

Renaud Séchan
Extrait de l'album "Morgane De Toi..."


Miss Maggie

Femmes du monde ou bien putains
Qui bien souvent êtes les mêmes
Femmes normales, stars ou boudins,
Femelles en tout genre je vous aime
Même à la dernière des connes,
Je veux dédier ces quelques vers
Issus de mon dégoût des hommes
Et de leur morale guerrière
Car aucune femme sur la planète
N's'ra jamais plus con que son frère
Ni plus fière, ni plus malhonnête
À part peut-être Madame Thatcher

Femme je t'aime parce que
Lorsque le sport devient la guerre
Y'a pas de gonzesse ou si peu
Dans les hordes de supporters
Ces fanatiques, fous-furieux
Abreuvés de haine et de bières
Déifiant les crétins en bleu,
Insultant les salauds en vert
Y'a pas de gonzesse hooligan,
Imbécile et meurtrière
Y'en a pas même en Grande-Bretagne
À part bien sûr Madame Thatcher

Femme je t'aime parce que
Une bagnole entre les pognes
Tu n'deviens pas aussi con que
Ces pauvres tarés qui se cognent
Pour un phare un peu amoché
Ou pour un doigt tendu bien haut
Y'en a qui vont jusqu'à flinguer
Pour sauver leur autoradio
Le bras d'honneur de ces cons-là
Aucune femme n'est assez vulgaire
Pour l'employer à tour de bras
À part peut-être Madame Thatcher

Femme je t'aime parce que
Tu vas pas mourir à la guerre
Parc'que la vue d'une arme à feu
Fait pas frissonner tes ovaires
Parc'que dans les rangs des chasseurs
Qui dégomment la tourterelle
Et occasionnellement les Beurs,
J'ai jamais vu une femelle
Pas une femme n'est assez minable
Pour astiquer un revolver
Et se sentir invulnérable
À part bien sûr Madame Thatcher

C'est pas d'un cerveau féminin
Qu'est sortie la bombe atomique
Et pas une femme n'a sur les mains
Le sang des Indiens d'Amérique
Palestiniens et Arméniens
Témoignent du fond de leurs tombeaux
Qu'un génocide c'est masculin
Comme un SS, un torero
Dans cette putain d'humanité
Les assassins sont tous des frères
Pas une femme pour rivaliser
À part peut être Madame Thatcher

Femme je t'aime surtout enfin
Pour ta faiblesse et pour tes yeux
Quand la force de l'homme ne tient
Que dans son flingue ou dans sa queue
Et quand viendra l'heure dernière,
L'enfer s'ra peuplé de crétins
Jouant au foot ou à la guerre,
À celui qui pisse le plus loin
Moi je me changerai en chien
Si je peux rester sur la Terre
Et comme réverbère quotidien
Je m'offrirai Madame Thatcher

Renaud Séchan / Jean-Pierre Bucolo
Extrait de l'album "Mistral Gagnant"


La Pêche À La Ligne

C'est à peine l'aurore
Et je tombe du plume
Mon amour dort encore
Du sommeil de l'enclume
Je la laisse à ses rêves
Où je n'suis sûrement pas
Marlon Brando l'enlève,
Qu'est c'que je foutrais là?
Sur un cheval sauvage,
Ils s'en vont ridicules
Dehors y'a un orage,
Y sont mouillés c'est nul!
Moi j'affûte mes gaules
Pour partir à la pêche
Musette sur l'épaule,
Saucisson, bière fraîche

Quand le soleil arrive,
Mon amour se réveille
Le coeur à la dérive,
Les yeux pleins de sommeil
Téléphone à sa mère
Qu'est sa meilleure amie
Paroles éphémères
Et tous petits soucis
J'aimerais bien entendre
Ce qu'elle dit de moi
C'est sûrement très tendre,
Enfin bon, j'entends pas
Moi je plante mon hameçon
Tout en haut d'une branche
Je tire sur le nylon,
Me ruine une phalange

Le jour avance un peu,
Mon amour se maquille
Un oeil et puis les deux,
C'est futile mais ça brille
Qui veut-elle séduire,
Je suis même pas là
Je me tue à lui dire
Qu'elle est mieux sans tout ça
Que ses yeux sont plus clairs
Quand ils sont dans ma poche
Et que vouloir trop plaire
C'est le plaisir des moches
Moi je sors une truite
D'au moins cent vingt kilos
J'ai pitié trop petite,
Je la rejette à l'eau

Il est midi passé,
Je reviens les mains vides
Trop de vent, pas assez,
L'eau était trop humide
Alors je rentre chez moi
Triste comme un menhir
Et personne n'est là
Pour m'entendre mentir
Mon amour est partie,
Est partie pour toujours
J'ai perdu mon amour
Et j'ai perdu ma vie

J'emmènerai dimanche
Si je peux la gamine
S'emmêler dans les branches
À la pêche à la ligne

J'emmènerai dimanche
Si je veux la gamine
S'emmêler dans les branches
À la pêche à la ligne

Renaud Séchan /Jean-Pierre Bucolo
Extrait de l'album "Mistral Gagnant"


Mistral Gagnant

Ah m'asseoir sur un banc cinq minutes avec toi
Et regarder les gens tant qu'y en a
Te parler du bon temps qu'est mort ou qui r'viendra
En serrant dans ma main tes p'tits doigts
Pis donner à bouffer à des pigeons idiots
Leur filer des coups d' pied pour de faux
Et entendre ton rire qui lézarde les murs
Qui sait surtout guérir mes blessures
Te raconter un peu comment j'étais mino
Des bonbecs fabuleux qu'on piquait chez l' marchand
Car-en-sac et Mintho, caramel à un franc
Et les mistral gagnants

Ah marcher sous la pluie cinq minutes avec toi
Et regarder la vie tant qu'y en a
Te raconter la Terre en te bouffant des yeux
Te parler de ta mère un p'tit peu
Et sauter dans les flaques pour la faire râler
Bousiller nos godasses et s' marrer
Et entendre ton rire comme on entend la mer
S'arrêter, repartir en arrière
Te raconter surtout les carambars d'antan, les cocos-boërs
Et les vrais roudoudous qui nous coupaient les lèvres
Et nous niquaient les dents
Et les mistral gagnants

Ah m'asseoir sur un banc cinq minutes avec toi
Regarder l' soleil qui s'en va
Te parler du bon temps qu'est mort et je m'en fous
Te dire que les méchants c'est pas nous
Que si moi je suis barge, ce n'est que de tes yeux
Car ils ont l'avantage d'être deux
Et entendre ton rire s'envoler aussi haut
Que s'envolent les cris des oiseaux
Te raconter enfin qu'il faut aimer la vie
Et l'aimer même si
Le temps est assassin et emporte avec lui les rires des enfants
Et les mistral gagnants
Et les mistral gagnants

Renaud Séchan
Extrait de l'album "Mistral Gagnant"


Morts Les Enfants

Chiffon imbibé d'essence,
Un enfant meurt en silence
Sur le trottoir de Bogotá
On ne s'arrête pas
Dechiqu'tés aux champs de mines,
Décimés aux premières lignes
Morts les enfants de la guerre
Pour les idées de leur père

Bal à l'ambassade,
Quelques vieux malades
Imbéciles et grabataires
Se partagent l'univers

Mort les enfants de Bopale,
D'industrie occidentale
Partis dans les eaux du Gange,
Les avocats s'arrangent
Morts les enfants de la haine
Près de nous ou plus lointaine
Morts les enfants de la peur
Chevrotine dans le coeur

Bal à l'ambassade,
Quelques vieux malades
Imbéciles et militaires
Se partagent l'univers

Morts les enfants du Sahel,
On accuse le soleil
Morts les enfants de Seveso,
Morts les arbres, les oiseaux
Morts les enfants de la route,
Dernier week-end du mois d'août
Papa picolait sans doute
Deux ou trois verres, quelques gouttes

Bal à l'ambassade,
Quelques vieux malades
Imbéciles et tortionnaires
Se partagent l'univers

Mort l'enfant qui vivait en moi,
Qui voyait en ce monde-là
Un jardin, une rivière
Et des hommes plutôt frères
Le jardin est une jungle,
Les hommes sont devenus dingues
La rivière charrie des larmes,
Un jour l'enfant prend une arme

Balles sur l'ambassade,
Attentat, grenade
Hécatombe au ministère
Sur les gravats, les grabataires

Renaud Séchan / Franck Langolff
Extrait de l'album "Mistral Gagnant"


Fatigué

Jamais une statue ne sera assez grande
Pour dépasser la cime du moindre peuplier
Et les arbres ont le coeur infiniment plus tendre
Que celui des hommes qui les ont plantés
Pour toucher la sagesse qui ne viendra jamais
J'échangerai la sève du premier olivier
Contre mon sang impur d'être civilisé
Responsable anonyme de tout le sang versé

Fatigué, fatigué
Fatigué du mensonge et de la vérité
Que je croyais si belle, que je voulais aimer
Et qui est si cruelle que je m'y suis brûlé
Fatigué, fatigué

Fatigué d'habiter sur la planète Terre
Sur ce brin de poussière, sur ce caillou minable
Sur cette fausse étoile perdue dans l'univers
Berceau de la bêtise et royaume du mal
Où la plus évoluée parmi les créatures
À inventé la haine, le racisme et la guerre
Et le pouvoir maudit qui corrompt les plus purs
Et amène le sage à cracher sur son frère

Fatigué, fatigué
Fatigué de parler, fatigué de me taire
Quand on blesse un enfant, quand on viole sa mère -- Fatigué
Quand la moitié du monde en assassine un tiers
Fatigué, fatigué

Fatigué de ces hommes qui ont tué les indiens
Massacré les baleines, et bâillonné la vie
Exterminé les loups, mis des colliers aux chiens
Qui ont même réussi à pourrir la pluie
La liste est bien trop longue de tout ce qui m'écoeure
Depuis l'horreur banale du moindre fait divers
Il n'y a plus assez de place dans mon coeur
Pour loger la révolte, le dégoût, la colère

Fatigué, fatigué
Fatigué d'espérer et fatigué de croire
À ces idées brandies comme des étendards -- Fatigué
Et pour lesquelles tant d'hommes ont connu l'abattoir
Fatigué, fatigué

Je voudrais être un arbre, boire à l'eau des orages
Me nourrir de la terre, être ami des oiseaux
Et puis avoir la tête si haut dans les nuages
Qu'aucun homme ne puisse y planter un drapeau
Je voudrais être un arbre et plonger mes racines
Au coeur de cette terre que j'aime tellement
Et que ce putain d'homme chaque jour assassine
Je voudrais le silence enfin et puis le vent

Fatigué, fatigué
Fatigué de haïr et fatigué d'aimer
Surtout ne plus rien dire, ne plus jamais crier -- Fatigué
Fatigué des discours, des paroles sacrées
Fatigué, fatigué
Fatigué de sourire, fatigué de pleurer
Fatigué de chercher quelques traces d'amour -- Fatigué
Dans l'océan de boue où sombre la pensée
Fatigué, fatigué

Renaud Séchan / Renaud Séchan & Franck Langolff
Extrait de l'album "Mistral Gagnant"


La Mère À Titi

Sur la tabl' du salon
Qui brille comme un soulier
Y'a un joli napp'ron
Et une huitr'-cendrier
Y'a des fruits en plastique
Vach'ment bien imités
Dans une coupe en cristal
Vach'ment bien ébréchée
Sur le mur, dans l'entrée
Y'a les cornes de chamois
Pour accrocher les clés
D'la cave où on va pas
Les statuettes africaines
Côtoient sur l'étagère
Les p'tites bestioles en verre
Saloperies vénitiennes

C'est tout p'tit, chez la mère à Titi
C'est un peu l'Italie
C'est l'bonheur, la misère et l'ennui
C'est la mort, c'est la vie

Y'a une belle corrida
Sur un moche éventail
Posé au d'ssus du sofa
Comme un épouvantail
Sur la dentelle noire
Y'a la mort d'un taureau
Qui a du mal à croire
Qu'il est plus sous Franco
Y'a une pauvre vierge
Les deux pieds dans la flotte
Qui se couvre de neige
Lorsque tu la gigotes
Le baromètr' crétin
Dans l'ancre de marine
Et la photo du chien
Tirée d'un magazine

C'est tout p'tit, chez la mère à Titi
Mais y'a tout c'que j' te dis
C'te femme là, si tu la connais pas
T'y crois pas, t'y crois pas

Sur la télé qui trône
Un jour j'ai vu un livre
J'crois qu'c'était "Le Grand Meaulnes"
Près d'la marmite en cuivre
Dans le porte-journeaux
En rotin tu t'en doutes
Y'a Nous-Deux, l'Figaro
L'Catalogue d'la Redoute
Pis au bout du couloir
Y'a la piaule à mon pote
Où vivent ses guitares
Son blouson et ses bottes
Sa collec' de B.D.
Et au milieu du souk
Le mégot d'un tarpé
Et un vieux New Look

C'est tout p'tit, chez la mère à Titi
Le Titi y s'en fout
Y m' dit qu' sa vie est toute petite aussi
Et qu'chez lui, c'est partout

Quand y parle de s'barrer
Sa mère lui dit qu'il est louf'
Qu'il est même pas marié
Qu'ses gonzesses sont des pouffes
Et qu'si y s'en allait
Pas question qu'y revienne
Avec son linge sale à laver
À la fin d'chaque semaine
Alors y reste là
Étouffé mais aimé
S'occupe un peu des chats
En attendant d'bosser
Y voudrait faire chanteur
Sa mère y croit d'ailleurs
Vu qu'il a une belle voix
Comme avait son papa

C'est tout p'tit, chez la mère à Titi
C'est un peu l'Italie
C'est l'bonheur, la misère et l'ennui
C'est la mort, c'est la vie

C'est tout p'tit, chez la mère à Titi
C'est un peu l'Italie
C'est l'bonheur, la misère et l'ennui
C'est la mort, c'est la vie

C'est tout p'tit, chez la mère à Titi
C'est un peu l'Italie
C'est l'bonheur, la misère et l'ennui
C'est la mort, c'est la vie

C'est tout p'tit, chez la mère à Titi
C'est un peu l'Italie
C'est l'bonheur, la misère et l'ennui
C'est la mort, c'est la vie

Renaud Séchan / Franck Langolff
Extrait de l'album "Putain De Camion"


Triviale Poursuite

Question d'histoire d'abord:
Où est la Palestine?
Sous quelle botte étoilée?
Derrière quels barbelés?
Sous quel champ de ruines?

Question d'histoire encore:
Combien de victimes,
Combien de milliers d'enfants
Dans les décombres des camps
Deviendront combattants?

J'en sais rien, j'donne ma langue au chagrin
Si tu sais, toi, souffle-moi

Question d' géographie:
Où est la Kanaky?
Combien de flics, de soldats
Pour tenir Nouméa
Pour flinguer Eloi?

Combien de petits blancs
De colons arrogants
Se partagent la terre?
Et combien de misère
Pour le peuple kanak?
Combien de coups de matraque?

J'en sais rien, j'donne ma langue au chagrin
Si tu sais, toi, souffle-moi

Question de sport:
Qui détiendra le record
Et restera vivant
Libre et innocent
Derrière des barreaux?

Vingt ans pour Otelo
Autant pour Mandela
Et combien de hors-la-loi
Chez ces p'tits juges en bois
Dont on fait les salauds

J'en sais rien, j' donne ma langue au chagrin
Si tu sais, toi, souffle-moi

Question science et nature:
Où balancer ces ordures?
Allez, à la Vologne!
Ces chiens qui assassinent
Ces rats qui emprisonnent!

Question d'littérature:
Qui a écrit que les hommes
Naissaient libres, égaux?
Libres mais dans le troupeau
Égaux devant les bourreaux?

J'en sais rien, j'donne ma langue au chagrin
Si tu sais, toi, souffle-moi
Souffre-moi
Souffre-moi

J'en sais rien, j'donne ma langue au chagrin
Si tu sais, toi, souffle-moi
Souffre-moi
Souffre-moi

J'en sais rien, j'donne ma langue au chagrin
Si tu sais, toi, souffle-moi
Souffre-moi
Souffre-moi

J'en sais rien, j'donne ma langue au chagrin
Si tu sais, toi, souffle-moi

Renaud Séchan / Franck Langolff
Extrait de l'album "Putain De Camion"


Me Jette Pas

Ben tu vois
Même moi
J'ai craqué
J'ai glissé
Quelquefois
Qu'est-c'tu crois?
Qu'j'suis en bois?
Qu'ces pisseuses
Aguicheuses
Me laissent froid?
Même moi
Qu'est-c'tu crois?
Qu'j'suis un ange?
Qu' ça m' démange
Pas un peu?
Déteste-moi
Mon amour
J'aimerai ça
Pas toujours
Mais un peu

Mais me jette pas
J'suis consigné chez toi
Me jette pas
Ou jette-toi avec moi

Tu r'marqueras
Qu'j'ai pas nié
Pris la main
Dans l'panier
J'ai avoué
J'ai pas dit
C'est pas moi
Cette fille j'la
Connais pas
J'la connais
Après tout
Tu t'en fous
Tu savais
Qu'la vie est
Dégueulasse
Que l'amour
Dure toujours
Et qu'c'est là
Qu'est parfois
L'angoisse

Mais me jette pas
N'existe pas sans moi
Me jette pas
Ou jette-toi avec moi

T'as raison
Les hommes sont
Des salauds
Des pas beaux
C'est pour ça
Que j'préfère
Les nanas
J'les préfère
Un peu trop
Quelquefois
Tu m'dis qu'toi
C'que t'aimes pas
C'est l'mensonge
Que ça t'ronge
Et qu'tu meurs
Moi c'est la
Vérité
Qu'j'trouve triste
À pleurer
Je pleure

Mais me jette pas
J'me f'rai tout p'tit, tout plat
Me jette pas
Ou jette-toi avec moi

Y'a pas d'ange
Sur cette terre
À part dans
Les cimetières
Les églises
Y'a qu'des types
Comme il faut
Avec leur bite
Leur couteau
Sous la ch'mise
J'suis qu'un mec
Fais avec
Mais fais pas
Comme moi
Mon amour
Où à peine
Pour t'venger
Mais sans haine
Sans regret
Sans amour

Me jette pas
Moi non plus je m'aime pas
Me jette pas
Ou jette-toi avec moi

Me jette pas
N'existe pas sans moi
Me jette pas
Ou jette-toi avec moi

Me jette pas
J'suis consigné chez toi
Me jette pas
Ou jette-toi avec moi

Me jette pas
J'me f'rai tout p'tit, tout plat
Me jette pas
Ou jette-toi avec moi

Me jette pas
Moi non plus je m'aime pas
Me jette pas
Ou jette-toi avec moi

Me jette pas
N'existe pas sans moi
Me jette pas
Ou jette-toi avec moi

Renaud Séchan
Extrait de l'album "Putain De Camion"


Putain De Camion

Putain c'est trop con
Ce putain d'camion
Mais qu'est-ce qu'y foutait là
Putain de vie d'merde
T'as roulé dans l'herbe
Et nous, tu nous plantes là

J'espère au moins qu'là-haut
Y'a beaucoup moins d'salauds

Tu nous laisses avec les chiens
Avec les méchants, les crétins
Sous un soleil qui brille moins fort et moins loin
J'voudrais m'blottir dans un coin
Avec Marius, avec Romain
Pleurer avec eux jusqu'à la saint-glinglin

Putain j'ai la rage
Contre ce virage
Et contre ce jour-là
Où tu t'es vautré
Dire qu'c'était l'été
Dans ma tête y fait froid

J'espère au moins qu'là-haut
T'as acheté un vélo

Lolita a plus d'parrain
Nous on a plus notre meilleur copain
T'étais un clown mais t'étais pas un pantin
Enfoiré on t'aimait bien
Maintenant on est tous orphelins
Putain d'camion, putain d'destin, tiens ça craint

Enfoiré on t'aimait bien
Maintenant on est tous orphelins
Putain d' camion, putain d'destin, tiens ça craint, ça craint

Renaud Séchan / Franck Langolff
Extrait de l'album "Putain De Camion"


Marchand De Cailloux

Dis Papa, quand c'est qu'y passe
Le marchand d'cailloux
J'en voudrais dans mes godasses
À la place des joujoux
Avec mes copines en classe
On comprend pas tout
Pourquoi des gros dégueulasses
Font du mal partout
Pourquoi les enfants de Belfast
Et d'tous les ghettos
Quand y balancent un caillasse
On leur fait la peau
J'croyais qu'David et Goliath
Ca marchait encore
Qu'les plus p'tits pouvaient s'débattrent
Sans être les plus morts

Dis Papa, quand c'est qu'y passe
Le marchand d'liberté
Il en a oublié un max
En f'sant sa tournée
Pourquoi des mômes crèvent de faim
Pendant qu'on étouffe
D'vant nos télés, comme des crétins
Sous des tonnes de bouffe

Dis Papa, quand c'est qu'y passe
Le marchand d' tendresse
S'il est sur l'trottoir d'en face
Dis-y qu'y traverse
J'peux lui en r'filer un peu
Pour ceux qu'en ont b'soin
J'en ai r'çu tellement mon vieux
Qu' j'peux en donner tout plein
J' veux partager mon Mac Do
Avec ceux qui ont faim
J'veux donner d'amour bien chaud
À ceux qu'on plus rien
Est-ce que c'est ça être coco
Ou être un vrai chrétien
Moi j'me fous de tous ces mots
J'veux être un vrai humain

Dis Papa, tous ces discours
Me font mal aux oreilles
Même ceux qui sont plein d'amour
C'est kif-kif-pareil
Ca m'fais comme des trous dans la tête
Ca m'pollue la vie et tout
Ca fait qu'je vois sur ma planète
Des ‘Intifada' partout

Dis Papa, quand c'est qu'y passe
Le marchand d'cailloux
J'en voudrais dans mes godasses
À la place des joujoux

Et p't être que sur ta guitare
J'en jetterai aussi
Si tu t'sers de moi, trouillard
Pour chanter tes conneries

Et p't être que sur ta guitare
J'en jetterai aussi
Si tu t'sers de moi, trouillard
Pour chanter tes conneries

Renaud Séchan
Extrait de l'album "Marchand De Cailloux"


P'tit Voleur

Enchristé depuis six mois, je t'écris
Mon poteau
De derrière les murs, de derrière la vie
Dis, est-c'qu'y fait beau?
Est-c'que dehors y'a des oiseaux?
Ceux qu'je vois ici sont tatoués sur ma peau

J'avais déjà purgé ma peine
Avant même d'être ici, toute ma vie
Z'ont pas compris ça, les teignes
Qui m'ont puni
Que la vie fut une chienne
Avec moi comme avec ceux
Qui ont dans les yeux
Trop d'amour ou trop de haine
Ou trop des deux

Enchristé parc' qu'un beau jour, sans remords
J'ai taxé
Un putain d'vélo même pas en or
Et puis, deux trois conneries, des trucs de pauvres
Des trucs pas beaux
Un autoradio, une montre ou un stylo

J'avais déjà purgé ma peine
Avant même d'être ici, toute ma vie
On m'a jamais dis: "Je t'aime"
Et ben tant pis
Si la vie fut une chienne
Avec moi comme avec ceux
Qui ont dans le yeux
De la braise, la cendre
Le feu

Tu ris, tu pleures, tu vis
Pis tu meurs
Trois p'tits tours et pis s'en vont les p'tits voleurs

Barreau, garrot, une corde
À bientôt
En enfer, au paradis ou au bistrot

Salue Manu, Pierrot
Et Angelo
Dis leurs bien que l'amitié ça tient chaud

Tu ris, tu pleures, tu vis
Pis tu meurs
Trois p'tits tours et pi s'en vont les p'tits malheurs

Tu ris, tu pleures, tu vis
Pis tu meurs...

Renaud Séchan / Jean-Louis Roques
Extrait de l'album "Marchand De Cailloux"


La Ballade Nord-Irlandaise

J'ai voulu planter un oranger
Là où la chanson n'en verra jamais
Là où les arbres n'ont jamais donné
Que des grenades dégoupillées

Jusqu'à Derry ma bien aimée
Sur mon bateau j'ai navigué
J'ai dit aux hommes qui se battaient
Je viens planter un oranger

Buvons un verre, allons pêcher
Pas une guerre ne pourra durer
Lorsque la bière et l'amitié
Et la musique nous ferons chanter

Tuez vos dieux à tout jamais
Sous aucune croix l'amour ne se plaît
Ce sont les hommes pas les curés
Qui font pousser les orangers

Je voulais planter un oranger
Là où la chanson n'en verra jamais
Il a fleuri et il a donné
Les fruits sucrés de la liberté

Renaud Séchan (Traditionnel) / Arrangement: Pete Briquette
Extrait de l'album "Marchand De Cailloux"


Tout In Haut De Ch'Terril

Dins chés corons queu r'mue-ménache
Chés mineurs vienn't' d'avoir leu congés
Prenn't' leu valisses et partent voyager
À la campagne ou vir leu parinté
Mi comme el'z'autes j'prinds mes bagaches
Ej' m'in vas mais j'quitte pont min pattlin
J'vos du pays v'là l'manière que j'm'y prinds
Sans débourser un sou d'train

Ej' passe mes vacances tout in haut de ch'terril
J'a toudis d'la chance ch' terrain i'est jamais pris
J'monte eum'toile ed'tente, j'vis tout seul, ej'm'arrinche
Ej'siffe, ej'ris, ej'cante, ej'sus heureux d'faire du campinche
Je m'fais la popotte, j'vis bien miux qu'à l'hôtel
J'mets comme les cocottes du rouche à mes ortels
Du haut dé m'couplette jé m'cros à Chambéry
Mais jé n'sus qu'au fazte tout in haut de ch 'terril

Comme point d'vue faut vir ch'que j'dégotte
Les bos, les prairies des invirons
Chés villaches, chés villes, nou corons
Et je m'rinche l'oeul cha n'me coûte pas un rond
Sus min fu d'bos j'fais tout m'gargotte
Viandox, peumes tierre frites, morcieau d'lard
Et j'a monté trint'chinq lites ed'pinard
Pour mi chucher in père peinard...

Ej' passe mes vacances tout in haut de ch 'terril
J'a toudis d'la chance d'vir ch'que j'vos ch'est à mi
Quand arrife eul'soir, ej'vos v'nir d z'amoureux
I z'attindent qu'i feche noir, mais mi je n 'les quitte pos des yeux
I vont s'inlaçant, s'dijant des balivernes
Tout in s'imbrassant dins chés blés, dins ch'luzerne
I s'font des papoules in s'app'lant "mon chéri"
Et mi j'vos tout cha d'tout in haut de ch 'terril

Mais avant hier j'n'a pont eu d'chance
D'un seul cop vlà qu'i s'met à pluvoir
'ltrinte à l'abri d'zous min perchoir
Em'tente all'pichot, ch'tot pire qu'un arrousoir
Alors j'a poussé la romance
J'a sorti pour m'éviter l'cafard
Et j'a fluté chinq six lites eud' pinard
In berloquant comme un pochard...

J'a dégringolé tout in bas de ch 'terril
Arrivé aupied jé m'sus rèl'vé tout meurtri
J'sais pus quo qu j'a fait j'avos tell'mint eun'cuite
A l'plache de m'barette j'avos sus m'tiête euch'codron à frites
Aforche ed'bourler m'panche sus des caillaux
Y'a eun' certain'plache i m'in manquot un morcieau
J'y'a mis un bout d'loque j'sus pos prêt d'ête guéri
Et j'sus armonté tout in haut de ch 'terril

Alors' pindant trente ans l'mineur-campeur
Il n'quitte pos sin cher terril, minme pinsionné
Il y va comme au passé.
Seul'mint aujourd'hui i'est malate,
El'fosse all'l'a usé.
I'est dins sin lit et les larmes aux yux
In ravisant à travers ech'carreau, i dit tout bas:

Comme cha va vite comme eul'temps passe
Au terril j'a campé bin d'z'années
A ch't'heure i faut l'abandonner
']é n'sus pus qu'un viux mineur pinsionné
Et j'n'a pus qu'des oches dins m'eareasse
J'sus vieilli mes gampes sont ramollies
Et de l'ferniète in étant dins min lit
In l'ravisant j'dis ch'est fini

J'mon'tra pus jamais tout in haut de ch 'terril
Fini désormais l'méd'cin j'l'ai bin compris
Par quarante ans d'fond mes poumons i'ont quite cosse
L'poussière eud'carbon in appelle cha la silicosse
Ch'est bétot min tour ed 'partir comme tant d'viux
D'faire un long séjour là auprès du Bon Dieu
J'espère qu'i m'laich'ra quand j's'rai au Paradis
Cor'v'nir in vacances tout in haut d'min terril
J'espère qu'i m'laich'ra quand j's'rai au Paradis
Cor'v'nir in vacances tout in haut d'min terril

Arthur Wéry / Charlys
Extrait de l'album "Renaud Cante El' Nord"


C'Est Quand Qu'On Vas Où?

Je m'suis chopé 500 lignes:
"Je n'dois pas parler en classe"
Ras l'bol de la discipline!
Y'en a marre c'est digoulasse!
C'est même pas moi qui parlais,
Moi j'répondais à Arthur
Qui m'demandait, en anglais,
Comment s'écrit No Future

Si on est punis pour ça
Alors je dis: "Halte à tout!"
Explique-moi, Papa,
C'est quand qu'on va où?

C'est quand même un peu galère
D'aller chaque jour au chagrin
Quand t'as tell'ment d'gens sur Terre
Qui vont pointer chez "fous-rien"
'Vec les d'voirs à la maison
J'fais ma s'maine de soixante heures,
Non seul'ment pour pas un rond
M'en plus pour finir chômeur!

Veulent me gaver comme une oie
'Vec des matières indigestes,
J'aurai oublié tout ça
Quand j'aurai appris tout l'reste,
Soulève un peu mon cartable,
L'est lourd comme un cheval mort,
Dix kilos d'indispensables
Théorèmes de Pythagore!

Si j'dois avaler tout ça
Alors je dis: "Halte à tout!"
Explique-moi, Papa,
C'est quand qu'on va où?

L'essentiel à nous apprendre
C'est l'amour des livres qui fait
Qu'tu peux voyager d'ta chambre
Autour de l'humanité,
C'est l'amour de ton prochain,
Même si c'est un beau salaud,
La haine ça n'apporte rien,
Pis elle viendra bien assez tôt

Si on nous apprend pas ça
Alors je dis: "Halte à tout!"
Explique-moi, Papa,
C'est quand qu'on va où?

Quand j's'rais grande j'veux être heureuse,
Savoir dessiner un peu,
Savoir m'servir d'une perceuse,
Savoir allumer un feu,
Jouer peut-être du violoncelle,
Avoir une belle écriture,
Pour écrire des mots rebelles
À faire tomber tous les murs !

Si l'école permet pas ça
Alors je dis: "Halte à tout!"
Explique-moi, Papa,
C'est quand qu'on va où?

Tu dis que si les élections
Ca changeait vraiment la vie,
Y'a un bout d'temps, mon colon,
Qu'voter ça s'rait interdit!
Ben si l'école ça rendait
Les hommes libres et égaux,
L'gouvernement décid'rait
Qu'c'est pas bon pour les marmots!

Si tu penses un peu comme moi
Alors je dis: "Halte à tout!"
Mais maintenant, Papa,
C'est quand qu'on va où?

Si tu penses un peu comme moi
Alors je dis: "Halte à tout!"
Mais maintenant, Papa,
C'est quand qu'on va où?

Renaud Séchan / Julien Clerc
Extrait de l'album "À La Belle De Mai"


Le Petit Chat Est Mort

Va donc pas pleurer
Ys'baladait peinard
II avait pas d'collier
II était libre d'aller
Et d'rev'nir pour bouffer
Il était même pas prisonnier
De ton amour insensé

T'aurais quand même pas
Voulu qu'y vive comme un con
Sur le canapé
Loin des gouttières des pigeons
C'tait un aventurier
T'aurais pas voulu qu'on l'attache
Y t'aurait miaulé: "Mort aux vaches!"

Le petit chat est mort
Il est tombé du toit
C'est comme ça
Il a glissé sur j'sais pas quoi
Et patatras
On l'enterra demain j'te jure
Dans un joli carton à chaussures

Le petit chat est mort
Et toi et moi on va
Couci-couça
À cause de quoi? À cause que c'est
Chaque fois comme ça
Pourquoi c'est toujours les p'tits chats
Et jamais les hommes qui tombent des toits?

C'était un vrai sac à puces
Encore plus libre qu'un chien
Pas l'genre pour un su-sucre
À te lécher la main
Mais la liberté tu vois
C'est pas sans danger, c'est pour ça
Qu'elle court pas les rues et les toits

C'était un vrai Titi
La terreur des p'tits oiseaux
La nuit y s'faisait gris
Pour les croquer tout chauds
C'est un peu salaud
Mais t'as jamais mangé d'moineau
C'est pas plus dégueu qu'un Mac Do

Le petit chat est mort
Il est tombé du toit
C'est comme ça
Il a glissé sur j'sais pas quoi
Et patatras
On ira d'main dans un jardin
L'enterrer aux pieds d'un arbre en bois

Le petit chat est mort
Et toi et moi on va
Couci-couça
À cause de quoi? À cause qu'on s'demande bien pourquoi
T'as jamais un pape sur les toits
Être trop près du ciel p't'être qu'y z'aiment pas

Renaud Séchan / Jean-Louis Roques
Extrait de l'album "À La Belle De Mai"


Adios Zapata!

Des rues de Bogota
Aux trottoirs de Miami
Ça fait trop loin pour moi
Alors je reste ici
Pourquoi je quitterais
Mon pays si joli
Pour aller galérer
Aux États-Unis
Du travail j’en ai
Le pavot, la coca
C’est pas Dieu qui les fait
Pousser, c’est mon Papa et moi

Adios Zapata! Que viva Marijuana!
Pour eux la mort
Pour nous la Samba!

Finie la guérilla
On faisait pas le poids
La lutte armée ça va
Quand t’as pas d’autre choix
Avec les gringos
On a trouvé plus malin
On fait du négoce
La main dans la main
Les banques, la C.I.A.
Sont nos meilleurs clients
L’argent de la coca
Eh! C’est toujours de l’argent

Adios Che Guevara! Que viva Marijuana!
Pour eux la mort
Pour nous la Samba!

Ils ont tué leurs Indiens
Et pillé mon pays
Nous on se venge enfin
Sans prendre le maquis
On fait agriculteurs
Et l’Oncle Sam achète
Et qui c’est le dealer
Qui pourrit la planète?
C’est mon Papa et moi
Ou bien c’est le yuppie
Qui blanchit, caramba!
Tout l’argent du trafic?

Adios Pancho Villa! Que viva Marijuana!
Pour eux la mort
Pour nous la Samba!

La vérité c’est que
Ces enfants de salauds
Ça les arrangent un peu
La came dans leurs ghettos
Ça tue surtout les pauvres
Les négrots, les bandits
Ça justifie les flics
Ça fait vendre des fusils
Mais un jour le quart monde
Dira aussi "Basta"
À la misère du monde
Et chant’ra avec moi

Viva Che Guevara! Zapata! Pancho Villa!
Pour eux la mort
Pour nous la Samba

Viva Che Guevara! Zapata! Pancho Villa!
Pour eux la mort
Pour nous la Samba

Renaud Séchan / Julien Clerc
Extrait de l'album "À La Belle De Mai"


La Médaille

Un pigeon s'est posé
Sur l'épaule galonnée
Du Maréchal de France
Et il a décoré
La statue dressée
D'une gastrique offense
Maréchaux assassins
Sur vos bustes d'airain
Vos poitrines superbes
Vos médailles ne sont
Que fientes de pigeons
De la merde

Un enfant est venu
Aux pieds de la statue
Du Maréchal de France
Une envie naturelle
L'a fait pisser contre elle
Mais en toute innocence
Maréchaux assassins
Le môme mine de rien
À joliment vengé
Les enfants et les mères
Que dans vos sales guerres
Vous avez massacrés

Un clodo s'est couché
Une nuit juste aux pieds
Du Maréchal de France
Ivre mort au matin
Il a vomi son vin
Dans une gerbe immense
Maréchaux assassins
Vous ne méritez rien
De mieux pour vos méfaits
Que cet hommage immonde
Pour tout le sang du monde
Par vos sabres versé

Un couple d'amoureux
S'embrasse sous les yeux
Du Maréchal de France
Muet comme un vieux bonze
Il restera de bronze
Raide comme une lance
Maréchaux assassins
L'amour ne vous dit rien
À part bien sûr celui
De la Patrie hélas
Cette idée dégueulasse
Qu'à mon tour je conchie

Renaud Séchan
Extrait de l'album "À La Belle De Mai"


Je Suis Un Voyou

Ci-gît au fond de mon cœur une histoire ancienne,
Un fantôme, un souvenir d'une que j'aimais...
Le temps, à grands coups de faux, peut faire des siennes,
Mon bel amour dure encore, et c'est à jamais...

J'ai perdu la tramontane
En trouvant Margot,
Princesse vêtu' de laine,
Déesse en sabots...
Si les fleurs, le long des routes,
S'mettaient à marcher,
C'est à la Margot, sans doute,
Qu'ell's feraient songer...
J'lui ai dit: «De la Madone,
Tu es le portrait!»
Le Bon Dieu me le pardonne,
C'était un peu vrai...
Qu'il me le pardonne ou non,
D'ailleurs, je m'en fous,
J'ai déjà mon âme en peine:
Je suis un voyou.

La mignonne allait aux vêpres
Se mettre à genoux,
Alors j'ai mordu ses lèvres
Pour savoir leur goût...
Ell' m'a dit, d'un ton sévère:
«Qu'est-ce que tu fais là?»
Mais elle m'a laissé faire,
Les fill's, c'est comm' ça...
J'lui ai dit: «Par la Madone,
Reste auprès de moi!»
Le Bon Dieu me le pardonne,
Mais chacun pour soi...
Qu'il me le pardonne ou non,
D'ailleurs, je m'en fous,
J'ai déjà mon âme en peine:
Je suis un voyou.

C'était une fille sage,
À «bouch', que veux-tu?»
J'ai croqué dans son corsage
Les fruits défendus...
Ell' m'a dit d'un ton sévère:
«Qu'est-ce que tu fais là?»
Mais elle m'a laissé faire,
Les fill's, c'est comm' ça...
Puis, j'ai déchiré sa robe,
Sans l'avoir voulu...
Le Bon Dieu me le pardonne,
Je n'y tenais plus!
Qu'il me le pardonne ou non,
D'ailleurs, je m'en fous,
J'ai déjà mon âme en peine:
Je suis un voyou.

J'ai perdu la tramontane
En perdant Margot,
Qui épousa, contre son âme,
Un triste bigot...
Elle doit avoir à l'heure,
À l'heure qu'il est,
Deux ou trois marmots qui pleurent
Pour avoir leur lait...
Et, moi, j'ai tété leur mère
Longtemps avant eux...
Le Bon Dieu me le pardonne,
J'étais amoureux!
Qu'il me le pardonne ou non,
D'ailleurs, je m'en fous,
J'ai déjà mon âme en peine:
Je suis un voyou.

Georges Brassens
Extrait de l'album "Renaud Chante Brassens"


Renaud.

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